Interview de Marc Lopez

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Interview de Marc Lopez, réalisée par la Cellule Com’, le 15 Mars 2024

1. Peux-tu nous résumer ton parcours professionnel ?
Je suis ce que nous appelons un local, venant de Toulon et ayant réalisé mes études à Marseille. Après le bac, j’ai commencé par faire un BTS analyses médicales. Puis, suite à mon premier travail où je ne parvenais pas à m’épanouir, j’ai repris mes études pour faire un parcours dit classique de licence / maitrise / DEA en biologie moléculaire / microbiologie / doctorat. J’ai ensuite réalisé tout mon parcours professionnel au CRCM dans l’ex Unité 119.

Dans le cadre de ma thèse de sciences dans le domaine de l’hématopoïèse normale et leucémique, j’ai parallèlement développé le service commun de cytométrie sur le site IPC.  J’ai ensuite rejoint l’Inserm sur un poste d’IR pour continuer à gérer et à développer le service de  cytométrie sur le site CRCM/IPC et parallèlement continuer mon activité recherche.

2. Parle-nous de tes motivations à l’origine de ton investissement dans la science.
Bien que mes parents ne soient pas du domaine de la biologie, j’ai très tôt eu un attrait important pour les sciences du vivant. Cela remonte à très loin, puisque je me souviens demander pour mes 12 ans un microscope, que mes parents avaient acheté chez un opticien. Ensuite, j’ai été très vite passionné par la recherche et les nouvelles technologies. Je passais beaucoup de temps à lire des revues scientifiques, des livres de biologie, à m’intéresser à l’histoire de la recherche. Lors de mon cursus d’études supérieures, j’ai aussi reçu des cours par des chercheurs passionnés par leur travail et cela m’a définitivement persuadé de suivre la voie de la recherche. Par la suite, mes rencontres avec Patrice Mannoni, Françoise Birg, et Claude Mawas pour qui j’avais beaucoup d’admiration, m’ont poussé à persévérer dans le domaine, et aujourd’hui, je peux dire que ma carrière professionnelle est une suite d’aventures passionnantes.

3. En 2012, tu obtiens le prix de l’innovation de l’Inserm et tu es re-baptisé le père des Nectines, peux-tu nous raconter brièvement cette découverte et les retombées qui s’en sont suivies ? 
J’ai contribué à l’identification de cette nouvelle famille de molécules d’adhérence dans l’hématopoïèse puis mis en évidence leurs rôles majeurs dans l’homéostasie épithéliale et le cancer. J’ai pu montrer que les nectines sont impliquées dans de nombreux processus biologiques et de nombreuses pathologies notamment via leurs rôles dans la régulation des processus inflammatoires et immunitaires. Elles sont impliquées dans le développement et des mutations type perte de fonction sont retrouvées et associées à des malformations chez l’Homme. Ce sont aussi des récepteurs de virus comme l’herpès simplex 1 et 2 et le récepteur de la rougeole. Enfin plus récemment j’ai pu montrer que la nectine-4 était un biomarqueur dans le cancer du sein triple négatif.

Pour la petite histoire, une des découvertes majeures amenant à cette « success story » a été faite en moins de 2 mois d’expériences et le papier a été accepté directement dans la revue Nature. D’un point de vue scientifique, l’ensemble de ces travaux m’a permis de publier environ 35 articles et plus de 10 brevets dans le domaine des nectines. J’ai pu aussi participer à la création d’une start-up en 2019 pour développer un médicament anti-nectine-4 de type immunoconjugué dans le traitement des cancers et dont l’essai clinique de Phase I impliquant l’IPC et le CRCM est en cours.

4. Un échec particulier qui t’a marqué dans ta carrière ?
Le domaine de la science biomédicale est particulièrement compétitif. Lors de nos découvertes sur la nectine-4 et le développement d’un immunoconjugué pour le cibler, nous nous sommes faits « scooper » les résultats par une équipe américaine. Cela a été très difficile à vivre. Mais au final, je peux le dire maintenant, ça a été un mal pour un bien. En effet, les américains ont développé le « first-in-class » immunoconjugué ciblant la nectine-4 et ils ont été les premiers à le tester chez les patients. Les résultats ont démontré des effets cliniques intéressants mais associés à des toxicités, notamment au niveau cutané. Cela nous a permis d’améliorer l’immunoconjugué, pour aujourd’hui, développer ce que nous appelons un « best-in-class » qui est actuellement en Phase I.

5. Quelle est la chose dont tu es le plus fier ?
J’ai un peu de mal avec cette notion de fierté. Si je dois mentionner quelque chose, je ne sais pas si nous pouvons appeler cela de la fierté mais gravir des sommets au Népal a été une expérience d’une grande intensité.

6. Peux-tu nous dévoiler ton livre préféré, ton film ou ta série Netflix préféré, et ton groupe de musique préféré ?
Je ne regarde pas vraiment de série et pour mon film préféré, la révélation du moment serait Oppenheimer. Par contre, je vis beaucoup avec la musique qui m’accompagne au quotidien. Je n’ai pas de musiciens ou de groupe préférés. J’aime la musique épurée, celle qui procure des émotions. Ca peut aller de Gustav Malher à Bill Evans en passant par Alberto Iglesias. Au niveau de la lecture, j’ai adoré « une histoire birmane » de G Orwell. J’aime aussi le Routard ou le Lonely Planet. Je pourrais facilement dire que j’aime voyager dans la lecture tandis que j’aime m’évader dans la musique.

7. Quel est ton plus grand rêve ?
Cela va paraître banal sûrement mais mon plus grand rêve, qui je l’espère est partagé par beaucoup, serait de vivre dans un monde de paix, où chacun respecte l’autre.

8. As-tu un talent caché ?
Je n’ai pas de talent à ma connaissance… Mais je pense plutôt une passion enfouie, le piano. J’aimerais beaucoup m’y remettre d’ailleurs.

9. Pour finir, aurais-tu un petit message à faire passer ?
J’en aurai deux qui sont plus ou moins liés. Le premier serait de s’investir pleinement dans toutes les tâches que nous entreprenons. Et le second, de Vivre avec un grand V ses passions que ce soit sur le plan professionnel et personnel.